[tokyo fever] nuit 1 - Sun Hee & Haku

tokyo night

feat. haku

Tokyo n'était plus plombée de trop de soleil. La place était battue par le vent, secouée de rafales et léchée par des langues de brume légère. Les toits d'ardoises luisaient d'humidité et le grondement furieux de la foule se refermait sur Sun Hee comme un cocon monstrueux.

Elle arpentait le bitume, enlacée dans ses propres bras,  menton levé vers les cieux, et se disait que ça pouvait être drôlement terne, les places japonaises, sans les éclats de rire et l'odeur du soleil.

Sun Hee était parti cueillir les plaisirs de la ville de ses pas éreinté, la mine consternée et le nez pointé vers l'horizon. Parce que ce matin là, elle avait été chargée de surveiller le voyage universitaire des doguslis et des cheonchi. Et parlons-en, de complication.
Dogsuli, c'est le nom que prennent les problèmes lorsqu'ils veulent sourire et vous séduire, et vous écorcher, pour finir par vous sourire une nouvelle fois. La fraternité d'Haneul semblait être tout ce que l'on détestait, des êtres abjectes qui recevaient un amour qu'ils ne méritaient pas et qu'il n'étaient même pas foutu de rendre. Des égoïstes, des purs et durs comme on en faisait plus. C'était, tout du moins, ce que l'idée populaire se plaisait à affirmer. Alors oui, il semblait légitime de dédaigner jusqu'au nom de la fraternité des aigles. Mais Sun Hee, elle, voulait bien croire qu'il y avait bien plus à découvrir que ça. Que chaque action avait une origine tout autant qu'une conséquence.

Parce qu'il y a cette voix qui murmure constamment à ses oreilles. Parce qu'il y a ce que tous relevaient comme une évidence. Les trompe l’œil du quotidien comme les jeux du destin. Parce qu'il y a Tae Jun. Les heures passés loin du monde, les plaisanteries, les sourires, les rires; les images dissonantes, les certitudes qui s'effacent. Et son regard qui peu à peu s'était habitué à voir au delà des "on dit". Qui essayait de le voir lui. Juste lui. Parce qu'elle a l'impression que Tae Jun le salopard est un peu plus qu'un bon coupable. Et c'est peut être là le nœud du problème - cette amer impression de perpétuer les mêmes erreurs qu’autrui. Elle hait la simple idée que Tae Jun puisse être un autre elle, une petite version édulcorée des enfants sans attaches, une version masculine qui pourrait avoir eu moins de chance, avoir été jugé trop tôt, trop vite et sans aucune forme de procès. Parce que chaque sourire qu'on lui arrache est une occasion perdue. Parce que, parce que. Parce que.
Parce qu'elle en avait envie, tout simplement.

▬ J'espère que tu n'as pas l'intention d'aller dormir tous de suite!

Eté ou pas, les doigts de Sun Hee était devenus un peu gourds. Elle enfouit sa main dans la poches d'Haku, le sourire un rien moqueur alors qu'elle le baladait dieu seul sait où pour faire dieu seul sait quoi. Ça la distrayait, en un sens. D'un trop plein de questions et d'incessantes interrogations. Et si par la même occasion elle avait l'opportunité de découvrir la capitale japonaise, elle n'en serait que plus heureuse. Surtout en compagnie de cet homme là. Le seul qui l'avait un jour traité comme une soeur.

▬ A moins que notre cher professeur soit à présent victime du poids de l'âge?

Sun Hee, elle l'embêtait, déambulant de sa démarche chaloupée tout en souriant. Ah Haku, il y était à présent habituée, à cette insolence personnifié.

tokyo night

feat. sunhee (vinyles idylles)

sunhee divine, sunhee gamine, sunhee qui gâche les plans, sunhee qui fait descendre de la comète - de la destinée toute tracée vers le pieu bien mérité. sunhee qui rit, qui sourit, qui se la joue soleil de poche à bien garder contre le coeur, sinon ça fait pas l'effet escompté - celui de réchauffer, réchauffer si fort que ça arrive à tout réparer. y'a sa voix qui palpite, qui vient taper dans ses oreilles, ça le fait presque sursauter au même moment qu'il tente de tout piger - haku qui peut toujours imaginer son calme plutôt que l'embrasser à pleine bouche. sunhee qui redevient une gamine joviale, une gamine presque insouciante qui au lieu de donner des ordres, préfère ramener le désordre. partir, sortir, fuir qui sait les responsabilités, le groupe de pseudo-adultes survoltés. ça semble pas si mauvais, à la fois tellement simple que ça devient ingénieux - il sourit, laisse transpercer le rictus sur son masque de chair, haku qui s'étire puis qui pousse un soupir.
- wah super, j'devrais applaudir pour une telle répartie. non vraiment, je m'incline. joignant les gestes à la parole, l'échine qui ressemble à un arc, le corps qui fait une courbette pour souligner le ridicule, elle l'a déjà chopé - il est foutu, un peu faible aussi, en manque des années dorées qui rimaient avec jeunesse déglinguée. haku soudain malicieux qui pourrait lui promettre les cieux - et les montagnes un peu plus basses, rien que pour la remercier, rien que pour lui murmurer tout ce qu'elle a pu lui donner, un soutien, bien plus important que sa vie de chien. sunhee celle qui a aidé, celle qui a obligé à voir le ciel sous un autre angle, pas un cimetière d'étoiles, mais un éternel recommencement.
- j'comptais pioncer, j'l'avoue, j'suis coupable de fatigue, stade quatre au moins. une main qui passe dans la tignasse de l'autre, défait sa chevelure de charbon. celle qui était jadis encore, une élève aux rêves sans doute un peu mièvres. mais soit, j'vais pas te laisser filer comme ça, j'risque de culpabiliser. un temps, le ronron d'un rire qui vient faire vrombir sa gorge.
- c'est quoi ton programme ? puisque la nuit pourrait leur appartenir, puisqu'elle pourrait leur dire une fois qu'ils sont un peu plus que ça. puisqu'il en est ainsi - qu'elle l'embarque, sunhee.