TAE JUN + KATEYA

Je jette un regard dédaigneux à ma soeur. Dire que j'aurais pu me retrouver avec un fille hyper canon et que j'aurais pu pécho comme un porc toute la soirée. Mais non, fallait qu'on me refourgue ma soeur. Comme si je l'avais pas déjà assez vue tous les jours de ma vie. Pourtant, je passe un bras protecteur par-dessus ses épaules nues. Ca reste ma petite soeur, même si je la trouve conne d'être venue dans cette tenue, on allait faire un concours de shot pour défendre notre frat, pas à un gala de charité. Je tire sur la clope qu'elle me tend et je la pousse vers l'entrée de l'espèce de hangar à bateaux lugubre où je vais aller défendre les couleurs de ma maison. « Allez, traine pas, ça a l'air mal famé dans l'coin. Putain la prochaine fois qu'ils font une compet faudra que je les finance parce que si c'est le seul endroit qu'ils ont pu trouver ça m'fait pitié. On va encore niquer nos chaussures. » Finalement j'avais bien fait de pas m'habiller. Quand je pense qu'y a pas deux heures j'pensais à venir en costard avec des chaussures Gucci. Finalement j'avais juste enfilé un hoodie et un jean à la va-vite puis la petite blonde que j'avais laissée dans ma chambre m'avait balancé des vieilles converses blanches par la fenêtre, donc j'avais mis ça plutôt que de venir pieds nus. On passe la vieille porte rouillée et on se retrouve dans une ambiance hyper glauque avec des néons rouges et des gens en train de se tripoter dans des canapés défoncés. J'esquisse une grimace. C'est pas vraiment mon genre de soirée, surtout pour ce qui est de la déco en fait. Je jette un coup d'oeil sur la moisissure courant sur les murs. Ouais, vraiment pas mon style. La fille nous explique le jeu, j'écoute pas grand chose, trop occupé à laisser mon regard lascif traîner sur son corps puis elle nous fait nous mettre face à face autour de la table. Parce qu'on est pas ensemble, on est l'un contre l'autre, j'avais presque oublié. J'esquisse un sourire à Kate et avale mon premier shot. 

Je suis venue déterminée comme jamais à gratter un max de points pour la frat contre le misérable vers de terre qui m’affrontera. Sûrement un péquenot de… Ah non. J’le reconnais tout de suite. Je verrais qu’un bout de son oreille que je saurais que c’est lui. Ils ont osé me foutre avec le frérot. J’vous jure les kang c’est pire que l’herpès ça vous colle à la tatane toute votre existence. « Allez, traine pas, ça a l'air mal famé dans l'coin. Putain la prochaine fois qu'ils font une compet faudra que je les finance parce que si c'est le seul endroit qu'ils ont pu trouver ça m'fait pitié. On va encore niquer nos chaussures. » Me lance-il en me prenant par l’épaule pour aussitôt m’escorter jusqu’à l'intérieur. Mmh... oula ! On se caille les miches ici. Ici parce que je sais même pas où on est d’abord. Un entrepôt bizarre et glauque, ils auraient comme même pu y mettre une plante verte histoire de rendre ça plus chaleureux quoi. Un pétunia ou j’en sais rien. Mais non. Ça ressemble à l’after d’une rave-party dans les bas fonds de la ville d'un mauvais polar et c’est pas que ça me dérange mais un petit courant d’air ferait du bien étant donné l’odeur rance qui règne dans le coin. Heureusement on a pas à poireauter longtemps comme des cons, une fille qui va chopper un rhume vient vite nous mener à la fameuse table de shots.

Tout s’enchaine assez vite à partir de là, l'inconnue nous explique le jeu le moins compliqué de la terre et ni l’un ni l’autre ne l’écoutons. En fait, je suis déjà omnibulée par tout ces verres remplis de liquides de toutes les couleurs. Je sais pas si c’est joli ou inquiétant. Mentalement j'suis rocky balboa et j’vais mettre K.O ce petit con prétentieux qui me sert de frère mais dans un élan fairplay je lui souhaite bonne fortune à ma façon, d'un air terriblement convaincu, tout en prenant place face à lui. « La chance est un oiseau qui passe sans bruit derrière le dos d'un aveugle. » En somme, que le meilleur de nous deux gagne. Mais accroche toi frangin, j’en ai vu passer d’autres. Avec mes breuvages de plantes macérées que je distille seulement les vendredis de pleine lune j’ai la gorge anesthésiée. C’qui me fait peur c’est que ça doit être tout chimique dans ces trucs, pleins de sulfates gluténéifés, d’ogm et d’additifs B1246 milles. Beurk. Je ferme les yeux, inspire un bon coup et one, two, three, viva l’algerie, je m’enfile le premier shot.

Elle me regarde dans les yeux et me sort une de ses phrases bidons, pour pas changer. « La chance est un oiseau qui passe sans bruit derrière le dos d'un aveugle. » Je lâche un ricanement moqueur. Elle a toujours été frappée et je me demande souvent comment on peut être de la même famille mais elle me fait marrer au fond avec ses trucs incompréhensibles qui font sens que pour elle même. La tequila descends le long de mon oesophage, y traçant un chemin brûlant. Je regarde ma soeur s'enfiler son shot avant de littéralement tout recracher sur elle, le liquide lui roule sur le menton et sur les fringues, elle a l'air de suffoquer. J'éclate de rire avant de reprendre un air sérieux, limite inquiet. Je lâche son nom sèchement. « Bora. » Je serre les dents pour m'empêcher de dire un truc que j'pourrais regretter. Putain, ils ont foutu quoi dans ces verres sérieux ? Elle a l'air plus dégoutée que quand je lui mettais des chaussettes sales dans la bouche quand on était gosse. J'commence à pas être rassuré mais j'perds pas mon but de vue, j'suis là pour gagner. Alors j'enfile un deuxième shot.
 

Blourp. Je mets pas un dixième de seconde avant de me rendre compte que ce shot est absolument immonde. C’est comme si un pet avait baisé avec un rat mort, qu’ils avaient eu un gosse nécrosé que celui-ci était un gout. Mon corps est physiquement incapable d’encaisser un truc pareil et je me mets à tout recracher sur moi comme une tarée qui se bave dessus. Ça me dégouline partout sur la gueule mais tout ce à quoi je pense c’est à surtout pas gerber. Je regarde mon frangin en chouinant. « Putain Juuuun. C’est archi dégueulasse… » J'ai envie qu'il fasse quelque chose, qu'il m'aide je sais pas... J’ai trop envie de vomir mais j’me fight intérieurement pour pas me mettre à chialer comme une gamine alors j’essaie de me convaincre que tout va bien dans ma tête, j’me chante une petite chanson pour contenir mes soubresauts : Colchiques dans les près, fleurissent, fleurissent. Colchiques dans les près, c'est la fin de l'été…

Faut que je me désinfecte la bouche. Alors quasiment aussitôt après avoir craché par terre sans ménagement une dizaine de fois je me jette sur un nouveau shot. J’en ai rien à foutre je me penche au maximum pour prendre celui le plus éloigné de moi, vers Jun, ses trucs ont l’air bons à lui. De toute façon si je le bois pas maintenant, je pourrais plus jamais le faire. Aller hop, je gobe le deuxième shot d’un air désespéré.