firework ϟ juyeon

La vie est une garce.
Elle adore faire du mal aux autres. Mais attention, ce n'est pas une garce qui blesse ouvertement, non, elle est bien plus tortueuse. Elle prend son temps. Elle endort la méfiance des gens par ses sourires, par son apparence d'amie moralisatrice obnubilée par sa sacro sainte justice, par sa prétendue morale. Vie, c'est votre meilleure amie, la main tendue, l'oreille attentive. Elle nourrit vos espoirs avant de vous poignarder dans le dos. Elle vous trompe de la pire façon qui soit, elle brise votre confiance pour un rien. Pire encore, elle vous fait croire qu'elle ne l'a pas encore fait exprès. Et si vous ne la contentez pas, si vous vous en relevez, son châtiment n'en sera que plus cruel. Et elle viendra cueillir votre pardon par ses quelques éclaircies, par son amour factice, putride.

Vie, c'est une semeuse de discorde, un fouteuse de merde qui aime à jouer de ses sourires, de sa douceur, des saveurs pour mieux vous attendrir puis frapper sans prévenir. Pour obtenir ce qu'elle veut, pour se distraire. Une connasse, une pure et dure comme on en fait plus. Car aujourd'hui, Vie lui imposait Coco. Celle qui arpentait le terrain de football, toute innocente, mais parfaitement factice.  Celle qui en cet instant précis, en troublait la paix préétablit.

Oh Coco.
Elle savait qu'elle n'aurait pas dû être là, qu'elle aurait dû être ailleurs, n'importe où, n'importe quand mais pas là, pas en ce lieu sacré. Qu'elle profanait volontairement. Elle n'était pas désirée dans cet endroit. Pour l'instant. Elle se faisait désirer et se rendait désirable, c'était la toute la différence. Mais là, elle n'aurait pas dû être là – briser cette quiétude en foulant les nuages. Elle n'aurait pas du oser, contourner les démarcations de sécurités en quelques rapides enjambées, et prendre ses aises dans cet espace prétendument réservé.
Elle était ici comme chez elle, sur le territoire de Juyeon.

▬ Juyeon.  

Elle eut un léger étirement des lèvres, un peu têtue, un brin frondeur, mais plutôt affectueux, les lèvres tièdes, la tête en arrière, le regard rieur et assuré, les dents mordillant l'intérieur de sa joue. Coco et son innocence espiègles, ces jambes qu'on croise sur l'herbe fraiche, cette plainte délicatement offerte comme un calumet de paix. Elle qui toujours arrivait et le prenait par surprise. Elle qui faisait comme si, bien sûr, ils ne s'étaient pas quittés quelques jours plutôt, comme si tout cela n'était qu'une continuité bien établie.
Qui toujours agissait comme un vilain chaton intrusif.

▬ Mais je t'en prie, continue ce que tu faisais. Je ne suis même pas là.

Et puis sourit, l'enfant.
Comme si cette invasion de son espace personnel n'était ni plus ni moins qu'un acte naturel. Un banal rapport de cause à effet. Et peut-être était ce le cas. Peut-être n'y avait il rien de plus vrai que ce soupçon de franchise avec lequel Coco prenait place dans sa vie. Pourquoi se serait-elle tenue là si ce n'est cela? Pourquoi l'aurait-il toujours laissé revenir, Juyeon. Pourquoi lui aurait-il permit de lentement, prendre ses aises dans les méandres de ses réticences. Avec ce soupçon d'agacement, cette nonchalante complaisance. N'est ce pas? Et ses yeux qui détaillait son jeu alors qu'elle fourrait l'une de ses sucettes entre ses lèvres,
mordillant la sphère rosé du bout des lèvres, appuyant ses mains dans son dos en guise d'appoint. Coco, qui très certainement, n'avait pas encore perçut la tempête.

une violent tornade cachée sous la peau. étouffée sous l'écorce, menaçante, prête à tout ravager en une fraction de seconde. et continuellement, chaque jour, juyeon s'efforçait de la contenir. il savait qu'elle était là, il savait qu'à n'importe quel moment de la journée, tout pouvait être réduit en miettes. pourtant, il continuait de prendre sur lui, comme si de rien n'était. avec ce même sourire et ces mêmes yeux éclatants. cette aptitude à devoir tout dissimuler, son père lui avait ordonné de la travailler depuis son plus jeune âge.
mais cette fois, il n'y arrivait même pas. c'est cette même haine, qui glissait désagréablement le long de ses veines, contaminant même son cerveau, lui imposant comme un filtre rouge devant les yeux. c'était cette journée où l'on arrive à rien, où même le soleil, d'habitude apaisant lorsque ses rayons courent sur la peau, devient particulièrement insupportable. incapable d'être satisfait, juyeon n'arrivait qu'à détester et maudire chaque détail du tableau. le terrain était trop petit, ses jambes pas assez solides, ses bras pas assez puissants, ses yeux inefficaces. il aurait voulu se remodeler, devenir parfait, et ne jamais connaître l'échec. ça n'était plus amusant d'être quelqu'un d'autre. c'est lors de crises comme celles-ci qu'il voulait tout cesser, s'étouffer avec tous les mots malhonnêtes qu'il avait pu tisser depuis qu'il était là.
la respiration courte et les muscles alourdis par l'effort, il releva la tête, l'expression de son visage abîmée par les émotions négatives. ses yeux s'arrêtèrent sur une silhouette qu'il ne connaissait que trop bien. une nouvelle rafale fulgurante de haine lui éclata au nez. il ne manquait plus que ça. l'incarnation même de sa colère et de son mépris, déguisés en une femme débordant d'une tentation excessivement agaçante. juyeon voulait s'assurer qu'il n'y avait rien que de la colère entre eux. du moins, il en était presque persuadé, lorsque sa voix vint s'introduire dans ses oreilles.
« qu'est-ce que tu fous là? » cracha t-il froidement et rapidement. chaque masque soigneusement construit avait immédiatement fondu. quand il était face à elle, au moins, il ne devait pas faire attention à ce qu'il disait, ni ce qu'il montrait.
avec une fascination qu'il n'était même pas capable d'assumer, il détaillait la friandise qui faisait briller les lèvres de coco. sans ne rien dire, il s’imprégnait de leur forme, l'apprenait par coeur, hâtivement. « il faut toujours que tu sois là dans les moments les plus chiants, histoire que ça devienne encore pire. » poursuivit-il, mauvais. et il était censé l'ignorer? ah, il en était absolument incapable. il n'avait même pas à essayer, il le savait. de plus, si elle était venue ici d'elle-même, elle savait ou du moins, se doutait que juyeon pouvait être là aussi.
tout ce qu'il pouvait faire, c'était projeter ses yeux venimeux contre les siens. comme un animal enragé ou contrarié. il ne pouvait pas se comporter autrement, il se sentait déjà presque trop désarmé.

Des garçons comme ça devraient être interdits. Juyeon mériterait la prison pour outrage à la pudeur par sa simple existence. Sa démarche est un strip-tease, il est un incendie à ciel ouvert, ses cheveux appellent une étreinte qui ne vient pas, tout en lui cherche à provoquer le délit. L’attentat aux mœurs n’est jamais loin, quand il sourit, ses dents blanches prêtes à épouser toutes les bouches. Tout ce que Juyeon a, Coco le veut, tous ceux qui le touchent, elle veut les toucher, et elle veut Juyeon, aussi, ça va sans dire. Mais Juyeon a quelque chose que les autres n’ont pas.

▬ Oh pitié.  

Ce qui est différent, c’est que Coco le déteste. Elle déteste tout ce qui chez lui est digne d’être aimé, tout ce qui séduit en lui, il faudrait passer son visage au vitriol et lui couper une main, le mutiler, en faire un bout de rien, pour que Coco soit la seule encore à pouvoir l’apprécier. Elle hait la simple idée que Juyeon pourrait être une autre elle, une petite version édulcorée de Coco, une version masculine qui pourrait plaire plus, être plus charmante et plus charmeuse. Chaque sourire qu’on lui arrache est une occasion perdue. Elle a l’impression que Juyeon le volage ne fait que lui voler ce qui lui appartient de droit ; c’est à dire tous, c’est à dire vous, c’est à dire tout. Il y a beaucoup trop de Coco dans l’air, ce aujourd'hui. Le crime parfait pourrait prendre place à cet endroit, et il pourrait aussi bien être un viol qu’un assassinat.

▬ Ne me colles surtout pas ta médiocrité sur le dos chaton, ça manque d'élégance.

Elle pourrait l’embrasser, le plaquer au sol et le dévorer vivant. Elle pourrait l’étrangler, le jeter à l’eau et le regarder flotter comme un bout de bois humide. Ce serait si facile. Elle ne s'arrête jamais de bouger, Coco. Elle est si plaisante à regarder, tandis qu'elle agite une main exprimant tantôt l'excitation et l'exaspération, pour illustrer son récit avec vivacité. Elle a posé la droite sur sa cuisse, et entre les doigts volubiles de la main mouvante on peut voir, quand elle s'immobilise par moments, une cigarette dont la cendre est éjectée d'un coup sec de l'ongle. Elle a les jambes croisées et son pied bat une mesure incomprise au rythme de laquelle pianotent ses doigts droits. Elle est agaçante, à ne pas tenir en place, à toujours tromper l'ennui en s'agitant pour un oui ou deux non.

▬ Mauvaise journée?

Et la sucette tournait une nouvelle fois entre ses lèvres, tâchant la chaire d'un sirop rosée.

partagé entre l'envie de lui saisir la gorge et celle de dévorer ses lèvres, juyeon n'était qu'une fois de plus plongé dans une confusion totale. il détestait vigoureusement à quel point il aimait tout ce qu'il voyait chez coco. il n'avait même pas envie de parler avec elle, en général. il voulait juste la partie où on ne ressent qu'un désir vrombissant. le reste était bien trop irritant. ce ton provocateur, ses yeux armes à feu et ses mots qu'elle dégainait constamment. elle attisait principalement son mépris, alors, juyeon ne se concentrait que sur ça. du moins, il s'efforçait de le faire, même si son regard se perdait beaucoup trop rapidement dans le somptueux dessin de ses courbes. il n'y pouvait pas grand chose, au final.
c'est lorsque tout se résume à la haïr qu'il se semble bien. cette fausse princesse au physique ravageur, sûrement trop occupée à être adulée ou convoitée. c'était certainement bien trop facile pour elle, de s'infiltrer proprement dans le cœur de n'importe qui pour le lui éclater en morceau. juyeon refusait catégoriquement de tomber lui aussi dans le piège, valorisant l'emportement à la fascination. il ne s'y  adonnait que lorsqu'ils rendaient tout deux les armes. et ça pouvait être n'importe quand, à n'importe quelle seconde, il suffisait de ne pas perdre. tout débutait d'une exaspérante provocation, frissonnant le long de la peau de juyeon. mais coco savait parfaitement comment s'y prendre, il ne lui avait pas fallu beaucoup de temps pour saisir le fonctionnement du jeune homme aux émotions trop extrêmes, même si celui-ci croyait bien faire en les cachant.
« ferme-là. », lâcha t-il par pur réflexe. il rêvait de la faire taire, peu importe la manière. ça bouillonnait, à l'intérieur, et il n'avait idée de comment est-ce qu'il pouvait contrôler ça. encore perdu entre plusieurs flots de sentiments contradictoires.  
« qu'est-ce que ça peut te faire? c'est pas comme si t'en avais vraiment quelque chose à foutre, non plus. » il haussa ses épaules en même temps que ses sourcils, las. il s'approcha d'elle, lentement, comme s'il s'apprêtait à faire quelque chose. comme si il pouvait vraiment faire quelque chose. la surplomber par sa taille semblait suffisait. même s'il aurait voulu lui arracher la sucette de sa bouche. « t'as rien à faire ici, à part venir m'emmerder. » il désirait plonger dans sa nuque. posséder son corps, sentir sa peau. mais son air hautain l'agaçait beaucoup trop. toutes manies et sa façon d'être. ses yeux brûlants plantés dans les siens, il projetait le même air arrogant, celui qu'il avait construit au fil des années. « t'es désespérée au point de venir me voir moi? parce que, je suis sûr que t'as même pas besoin de chercher longtemps, si tu veux trouver quelqu'un pour occuper ta petite vie ennuyeuse. » dédaigneux, il détacha chacun de ses mots, la fatigue de la journée traînant encore contre son dos.
les cellules de son corps lui criait de partir. si c'était si énervant, il n'avait qu'à s'en aller. mais ça reviendrait à fuir, coco aurait l'avantage. juyeon ne pouvait que confronter face à face la source de son ennui.

Elle était comme une tumeur qui n'a jamais disparue. On ne la voit pas, mais on sait qu'elle est là et qu'elle s'accroche. Elle est insupportable et noire, et elle ronge petit à petit, elle s'agrippe à votre peau et vous êtes contaminé. Coco est une tumeur qui vous boufferait bien le coeur pour peu que cela lui arrache un sourire moqueur. Elle contient du poison mais tant mieux si tout le monde souffre autour d'elle. Juyeon aurait pu garder son côté je m'en foutiste, il aurait pu tout simplement faire comme d'habitude, l'ignorer.

▬ Ou sinon?  

Sinon quoi ? Vas-y Jung, dis-moi. Tu vas m’insulter, me frapper, me forcer à me taire ? M’obliger pour toujours à baisser les yeux devant toi? Qu’est-ce tu vas faire, Jung ? Tu ne sais rien faire par toi même. C'est ce que son regard lui chuchotait, c'est ce que tout son être lui hurlait. Coco qui s'était soudainement redressée, écrasant sa cigarette dans l'herbe humide.

▬ Mais ça tu l'aimerais bien hein. Que j'en ai quelque chose à foutre, de toi et de ta petite gueule.

Elle a un petit rire.
Ce n'est pas vraiment une prière pour attirer son attention. Plutôt une concession, une requête, une exécution, une croisade, un génocide. Mais ça lui ferait mal s'il s'en foutait, la pauvre chérie. Elle en aurait l'égo tout cabossé, la fierté renversée. Elle se redresse, mutine, et elle tend la main, passe ses doigts sur sa joue sans le toucher, joue avec une mèches de ses cheveux sombres, puis effleure sa peau. Ses phalanges glissent un instant puis se suspendent, à quelques centimètres de la mâchoire saillante qu'elle taquine de la pointe de son ongle. Regardes toi Juyeon. S'il pouvait l'enlever un moment qu'il l'étrangle encore et encore - qu'elle la ferme, oh oui qu'elle la ferme.

▬ Navrée de décevoir tes ambitions, mais à la base je venais courir. Mais la politesse exige que j'attende que le premier occupant finisse.

Plus sa réflection avançait, plus Coco souriait. Il y avait quelque chose de délicieusement ironique dans la prononciation d'un discours si bas - le plaisir de dévorer la chaire mise à nue de ses lèvres charnues.

▬ Et de toi à moi, qui pue le désespoir? M'enfin, ma vie est fort intéressante. Là tous de suite, je m'amuse comme une folle.

Et c'était drôle, si ironiquement drôle qu'elle aurait put en rire à s'en déchirer les cordes vocales, à s'en retourner l'estomac. Mais Coco elle n'était pas comme ça voyons, Coco elle était douce. Cette douce enfant qui lentement portait sa sucrerie dans les airs avant de l'appuyer contre les lèvres de son adversaire
Elle trinquait en l'honneur d'un beau malheur.

au final, il s'agissait de deux enfants, trop occupés à se tourner autour. trop taquins pour communiquer correctement, il fallait se lancer des piques et se regarder comme des animaux. un jeu ridicule qui s'était mit en place automatiquement, ils n'avaient pas eu à se découvrir, leurs personnalités avaient explosé l'une contre l'autre à l'instant où ils s'étaient rencontrés. et quand elle était là, ça prenait bien trop d'ampleur dans la tête de juyeon pour qu'il se contente de l'ignorer. elle devait sûrement le savoir, d'ailleurs, vu à quel point ses yeux s'enroulaient autour de lui vicieusement. « sinon, je me démerderai pour te faire regretter de te pointer ici comme une fleur. » détacha t-il dans sa colère. son regard traduisait les flammes, dans lesquelles il aurait aimé voir coco se consumer. avoir le dessus sur elle était la seule chose qui comptait.
elle dégainait ces mots, encore et encore. son rire lui écorche les oreilles, à juyeon, qui reste là, à lui donner tout ce qu'elle veut, c'est à dire, de l'attention. il est là et il la méprise, avec toute la force que l'on peut concentrer dans deux simples globes oculaires. il veut dire quelque chose, il veut encore lui vomir sa haine sur son délicieux visage, mais il se sent immobilisé par le bout de ses doigts. il les aurait brisé. eux et leur détentrice, qui nouait ses mots tranchants autour de son cou. ça n'étaient pas comme s'ils l'atteignait vraiment. il n'en avait pas grand chose à faire, trop habitué à ce genre de provocation, qui revenaient plusieurs fois dans la semaine. aujourd'hui n'était simplement pas le bon jour, et coco en avait très bien profité, évidemment. ignorant sa provocation d'un roulement d'yeux, il écouta cependant sa justification. bien sûr qu'elle tenait debout, et qu'elle parvenait une nouvelle fois à faire tourner la situation à son avantage. lui voulait juste le silence. qu'elle se taise, qu'elle baisse le regard, qu'elle s'écrase complètement face à lui.
à son dernier projectile, il souffla un bon coup. comme s'il n'avait pas remarquer qu'elle s'amusait, à ôter ses nerfs un à un, un charmant sourire dessiné sur ses délicates lèvres. « gamine. tu es détestable. » articula t-il en entrouvrant la bouche pour ensuite s'emparer de la sucrerie. il attrapa ensuite le visage de coco du bout de ses doigts, et l'approcha du sien, laissant une fine distance entre les deux. à un battement de lui déchirer les lèvres des siennes. il croqua le bonbon d'un coup, trop peu patient pour le laisser fondre. « d'ailleurs, ça tombe bien, j'ai terminé. toi qui t'amuse tant, épargne moi ta voix insupportable et va donc courir, qu'on soit deux à s'éclater. » continua t-il, sarcastique. il la repoussa et croisa les bras contre son torse, lui désignant la piste d'un signe de tête. en réalité, il n'en avait pas grand chose à faire, si ça pouvait seulement l'éloigner de lui un court temps - et puisqu'il ne l'appréciait que lorsqu'il la regardait et qu'elle se taisait, l'occasion était parfaite.

Adorable.
Qu'il était mignon. Presque... touchant.
Sa poitrine toujours secouée de l'éclat de joie, elle fit l'effort de se redresser, pétillante, brillante, pour pouvoir de nouveau le noyer sous son regard, en s'appuyant tendrement sur sa main. Un coin de ses lèvres se tendait dans le bonheur.  Elle soupirait, amusée de son attitude soudaine et de ses boucles brunes qui dessinaient des nymphes.

▬ J'attend de voir ça.  

Coco s'approchait encore et encore. Contre lui.
Coco qui fonctionnait toujours ainsi, lentement, elle prenait place dans la vie des autres. Elle y entrait puis ressortait aussi vite. Et alors, dans un léger bruit de gorge, comme elle s'en amusait parfois, elle se glissa à ses côtés, penchée sur l'oreille délicatement ourlée. Quand elle sentit la peau fraîche de Juyeon, contre celle brûlante de sa joue, son rire d'ivresse se fit ténu, comme son insouciance. Elle effleurait alors la chaire lunaire de la caresse de son souffle.

▬ Affreusement détestable. Horrible petite conne de blonde.

Elle le taquinait.
Elle avait cette sensation pendue au bout de ses doigts lorsque ses mèches folles et sombres piquaient les siennes tout autour –. Elle s'approchait, malsaine, alors que ses mains glissaient le long de sa colonne. Elle lui volait son oxygène. Oh Coco. Elle aimait voir son visage crème gravé de ces deux filigranes, ces lèvres coralliennes - elle aurait aimé les cueillir doucement, tendrement, avec la faucille la plus délicate qu'il soit ; sa bouche. Poser ses doigts de chaque côté de ses joues d'ivoires, et le piquer d'un baiser –. Et là, elle presserait ses lèvres un peu plus fort –. A chacune d'elle.
A chacun d'eux – à chaque soupir.

▬ Et pourtant...

Ce furent ses doigts à lui qui la saisirent. Ce furent ses lèvres qui semblaient prêtent à déchirer sa chaire. A la passion comme à la haine. Et ses dents qui se refermèrent sur ce bout de sucre dans un craquement de fin du monde. Et Coco souriait. Et Coco combla l'espace qui les séparait pour déposer un baiser sur sa joue échauffée. Dans leur querelle incessante. Vendetta sans âge, dénuée de tous sens commun où rien ne comptait si ce n'est mettre l'autre à terre quoi qu'il advienne. Une guerre de tranchée trop souvent éprouvée. Jeu inlassablement remanié.

▬ Tu devrais vraiment te détendre chaton..

Elle s'éloignait déjà, maintenant dos à lui, enfonçant ses écouteurs dans ses oreilles, son visage incliné vers le ciel ensoleillé. Elle la sentait presque. La rage de Juyeon. Elle rampait sous la peau et grignotait ses nerfs. Elle lui faisait mal. Ca lui faisait toujours mal, ces choses là, bien trop éloignés de la saine indifférence. Encore aujourd'hui. Elle le détestait pour ça. Elle le haïssait. Qu'il la désire donc un peu plus. Qu'il la haïsse encore plus. Qu'il s'y perde dans Coco, qu'il y plonge, qu'il s'en trouve submergé. De trop de passion, de trop de rage, de trop de fracas. Qu'elle retourne tout dans son cerveau étriqué, dans son palais soigneusement compartimenté. Elle voulait sans vouloir. Savait sans savoir. Elle se contentait de prendre Coco. D'en prendre toujours plus.