drink it up ϟ giselle

drink it up

C'est froid.
Comme une lame de rasoir qui érafle la chaire. Comme une vague à l'âme qui vous transperce. Coco, elle balance entre rire et panique. Elle s'affole et elle surnage. Elle s'accroche à Gigi aussi. Elle la tire de sa maigre force, pauvre conne rachitique qui lutte contre l'inévitable. Gigi. Elle l'avait vu sourire. Elle l'avait vu rire sous les flots, alors qu'elle se laissait engloutir par les eaux. Gigi ne craignait pas la mort sans l'appeler à grand cri. Coco, elle avait presque eut envi de se laisser engloutir, elle aussi. Découvrir si c'était mieux là bas. En bas. Eternellement enlacée à sa Kitty. Une chaste étreinte qui n'en finirait jamais. Qui dans une dernière expiration, mettrait fin à tous le reste. La douleur, la peur, l'attente, l'amour perdu, l'amour déçu. Mais elle ne pouvait pas Coco. Peut être qu'elle était trop lâche pour ça.  Alors elle s'accroche. Elle aide sa Kitty à grimper sur leur radeau et s'y hisse dans une dernière expiration épuisée.

▬ Totalement.  

Elle sourit Coco. La brume avait disparut, le monde n'avait plus cette teinte détrempée, épurée qu'elle lui avait trouvé. Elle en frémit, se roulant sous la serviette à la recherche d'une source de chaleur qui lui faisait défaut. Ca avait un rien de déroutant, d'avoir les pieds sur terre, si solidement ancrée qu'il ne lui restait plus grand chose auquel elle aurait put se raccrocher.

▬ J'ai froid. Mais je me sens bien avec toi. Alors ça va.

Elle rit, un petit rire absurde alors qu'elle appui sa joue contre son épaule, qu'elle emmêle ses jambes aux siennes. Parce que Kitty, elle est magique. Parce qu'elles ont faillit mourir. Mais ça semble dérisoire soudainement, presque illusoire. Proche et lointain tout à la fois. C'est comme être anesthésié, sentir son coeur battre la chamade alors que son corps est figé, totalement frigorifié. Ca picote sous épiderme, ça fourmille sous la peau comme un millier d'insecte.  Coco, elle promène ses doigts dans son dos. Des petits pas de bonhomme de chaire. Elle fredonne un instant, rassemble ses pensés qui éclatent contre les parois de son crâne. Ca la chatouillait, là, sur le plat de sa langue.

▬ Est ce que t'aurais préféré couler ma kitty?

Envolée. Aspirée à tout jamais, là où aucun homme ne viendrait. Loin des peurs à venir et des terreurs passés. Loin de ses cauchemars d'enfant et cette affreuse banalité. Elle pouvait comprendre ça Coco. Ce désir d'être unique, insoumise à cette sacro sainte loi modique. Un rêve piriforme de petite fille. Être une fée. Fée mirage, fée caprice. Fée des eaux aussi. Est ce qu'elle aussi elle pouvait rêver de devenir magique? Être un peu plus qu'un souvenir. Si ténu, si insignifiant qu'elle finissait inévitablement par sombrer dans l'oubli. Et c'est peut être ça qui la terrifiait, cette impression de n'être qu'une parenthèse. D'être celle qui ne reste jamais.

drink it up.

p'tite tenue kitue ƒ J’en viens encore à me demander où est-ce que j’ai bien pu trouver la force d’hisser mon corps sur notre bateau de fortune. ha oui, forcément avec l’aide de ma coco. Ma coco c’est comme une partie de mon âme, la force que je n’ai jamais eu, je la retrouve en elle. Elle est ce qui réussi à me compléter par dieu ne sait quel moyen psychiques et c’est pour ça que je l’aime. J’englobe son doux visage d’un regard éperdue d’admiration pour ce bout de femme fantastique. Elle est belle, ma coco.

Je suis fermement emmitouflée dans notre immense serviette de plage qui aurait fait de l’ombre à une couverture king size, pour une fois qu’une bonne idée me sort par les trous de nez. franchement. Je me blottis un peu plus contre coco, finalement, nos corps sont peut-être gelés mais nos âmes n’en sont pas moins bouillantes de folie -et drogues en tout genre. Je jette un coup d’oeil vers les étoiles avec la furieuse envie de m’y plonger. Me laisser planer dans un vortex quelconque et ne jamais en revenir. un plane sans fin pour toute l’éternité, le rêve absolu n’est-ce pas ? « J'ai froid. Mais je me sens bien avec toi. Alors ça va.  » Un sourire doux se dessine sur mes lèvres et je me tourne lentement vers coco, dévoilant mes petits dents bien alignées par je en sais quel miracle de la nature. Un parmi tant d’autre. « Moi aussi ma coco, je suis bien avec toi. » puis je pose ma tête sur sur la sienne, joue contre mon épaule, en secouant frénétiquement le liquide au fond de la bouteille soigneusement callée entre mes doigts fins.

Je trouve tout cela fascinant, je venais de passer au moins une heure ou deux sans hallucinations et je me sentais plus en sécurité que jamais. Au milieu de nulle part, à la dérive sur un océan sombre et fortement menaçant. Pourtant je ne me sentais pas pour autant, menacée. Je souris toujours à l’entente des derniers propos de ma coco. Aurais-je préféré couler ? « Je… Ne sais pas. » c’était la pure vérité. Aussi longtemps que je m’en souvienne, j’ai toujours été destructrice et dangereuse à travers ma douceur d’être. Ce n’est pas forcément une grande nouveauté, alors je décolle ma tête de celle de coco puis débouche la bouteille pour en boire une très longue gorgée avant de tirer sur le joint. Je balance ma tête en arrière et souffle la fumée dans le ciel, comme si une quelconque forme de vie outre-monde pourrait sentir l’odeur de la weed des ilgagsu. « Je ne sais pas ce que je voudrais vraiment en fait, ma Coco. Je n’ai probablement jamais su. J’ai perdu le fil du temps il y a longtemps, alors qu’il s’arrête maintenant ou demain, quelle importance ? » Puis je lui jette un regard empreint de solitude. Je ne suis pas suicidaire, non, mais que dire… Destructrice, oui, mais j’ai des raisons de vivre encore, deux en particulier, Lenny et Coco. Alors pourquoi m’étais-je laissée couler ? « Je crois que je suis vraiment trop défoncée. » Voilà l’unique réponse plausible à sa question, au final. Il n’y avait pas d’autre explication. Je me sentais si bien sous l’eau que toute forme de danger en avait disparue. « C’est…. Dangereux tu pense ? De ne plus ressentir aucune limite ? Comme si tout irait bien malgré le danger ? » Je la questionne en tirant une dernière latte sur le joint avant de le lui tendre. Du coin de l’oeil je voit une forme se dessiner dans le lointain. Non, je ne regarderais pas, ce n’est pas réel. Rien ne l’est.

drink it up

Ah, elle s'en était allée, la tige fumante.
Morte elle aussi, dans un de ces rares instants de mélancolie. Comme s'ils n'étaient tous que ça finalement: des instants mélancoliques. De vulgaires notes dissonantes dont on peinait à tirer un semblant d'harmonie. Des bouts de riens en val d'amour dont on accolerait bien plus aisément l'adjectif de putain que d'être sain. L'attentat aux moeurs n'est jamais bien loin lorsqu'il leur prend l'envie d'enfreindre les limites mêmes des interdits. Transcender l'impossible. Pisser sur le réel, c'était là le maitre mot de leurs devise. Et un jour, sans doute, finirait-elle par se hisser au sommet des plus hauts édifices. Pour arroser de leurs bouteilles le monde et ses confins. Laver de leur péché tous ces pauvres mortels, âmes crédules soumit à leurs éternels rituels. A se persuader qu'ils sont heureux même s'ils ont oubliés comment vivre pour se borner à survivre. En se persuadant qu'en mettant des règles sur tout mais surtout sur rien, tout serait plus facile. Parce qu'au fond, y'avait rien de plus terrifiant que le vide. Le mystère. L'inconnu et ses écluses. Mais la beauté du vide justement, la beauté du rien, c'est qu'on pouvait s'y blottir lorsqu'à pleine bouche on l'embrassait. Un sommeil qui ne s'éteindrait jamais. Parce qu'un jour viendrait où tous se lasseraient de chercher la lumière. Où ils réaliserait que comme tous le reste, elle demeurerait une chimère.
Et peut être bien qu'il n'y aurait que votre trépas pour vous faire l'atteindre.

▬ Ca a l'importance que tu lui donnes ma Kitty. Moi j'ai décidé que ma vie s'arrêterait à 25ans. Comme ça, je serai éternellement jeune et con. Je serai Peter Pan, tu comprends? Avec un vagin et une paire de nichon.  

Et elle t'emmènerait voguer vers le pays imaginaire Gigi. Là où tu n'es plus seule, là où tout s'élève, où rien ne retombe, là où le monde n'est qu'une valse, une note de jazz pour le piquant, un rift de rock pour le brûlant, un accord de classique pour la tendresse, un air de reggae pour la défonce. T'es pas seule Kitty Cat. Parce que t'as Coco. Coco qui te laissera jamais tomber à l'eau.

▬ C'est dangereux ma Gigi. Mais en même temps,
prendre le métro est dangereux. Manger du riz aussi et se gaver de bonbon encore pire. Alors est ce qu'on devrait pas s'en foutre un peu,
de ce qui est dangereux?

A se considérer comme une foutue gonflable un jour puis comme une déesse le lendemain. Attraper le joint qu'elle blottit entre ses doigts. Jusqu'à remplir ses poumons. Et tout garder à l'intérieur, une seconde puis deux, une seconde de trop. Puis tout relâcher dans un soupir et le lui rendre. Peut être que comme ça, elle les aura noircie de nouveau. Peut être qu'avec tout ça, elle disparaitra avant que toutes ces belles paroles ne soient plus que ça justement, des belles paroles. Des vestiges de piètres mensonges. Ceux auxquels ont croit très fort, comme à des miracles. Dans l'espoir qu'un jour, peut être, ils s'avèrent être vrais.  Et Coco, elle ne s'y attarde, elle a sa tête mollassonne qui se tourne vers le large. Qui y esquisse le contour d'un "quelque chose". Un quelque chose de plat, un quelque chose de sombre. Bateau ou îlot, elle ne saurait dire. Peut être également qu'elles n'ont fait que contourner la côte pour finalement atterrir sur un bout de port.

▬ Ma Gigi, je crois qu'on tient là notre première escale.

Escale sans nom et sans réel destination. Escale qui, peut être, les mettraient juste un peu plus dans l'embarras. Mais ça Coco, elle ne s'en préoccupait pas. L'embarras était l'une des nombreuses notions qui l'effleuraient sans jamais l'entachée. Mademoiselle était sans honte et remplit d'audace, un cocktail dangereux face auquel le bon sens pliait.