Party time ft. Yang Evan

Il est huit heure quand Riok rentre au dortoir des dogsuli. Il sait que Evan est là, et qu’il serait dans leur chambre. Le franco-coréen s’était toujours considéré chanceux d’avoir le taïwanais comme coloc depuis quelques temps, car les débuts dans cette université n’ont pas été glorieux et avoir un coloc avec qui il pourrait au moins s’entendre l’arrangeait, mais Evan dépassait ses espérances.
Il ouvre la porte avant de poser son sac à l’entrée, lâchant un soupire de soulagement en enlevant ses chaussures serrée de fils de riche. « J’suis rentré ! » lança-t-il en enleva sa veste de costume pour s’avancer dans la chambre et de tirer sur sa cravate nouée. Il lança un regard vers le jeune homme avant de dire: « T’es pas sorti aujourd’hui ? » C’était différent pour Riok. Ce weekend, il avait été demandé par son oncle pour diverses raisons barbantes et maintenant, il avait envie de s’amuser et quoi de mieux qu’aller boire un verre avec son meilleur ami ? Il vint près de son colocataire et passa un bras autour de lui avec un sourire en coin. « Tu sais quoi ? J’ai envie de sortir et qu’on aille s’amuser. On le mérite bien tu crois pas ? » En vérité, Riok ne s’amusait pas la plupart du temps. Il était constamment songeur, bougon et désagréable…Sauf quand il était en bonne compagnie, et c’était rare. Ou pas depuis quelques temps, puisque le psychologue fréquentait plus ou moins la championne de taekwondo Kim Sun Ah. Il n’avait pas encore élucidé cette partie avec son ami, mais ce soir était le moment. « Allez, un verre ! Je sais que t’en meurs d’envie. ». Mais quand Riok disait un verre, c’était en fait dix bouteille de bière ou de soju. La soirée allait être prometteuse si Evan voulait bien se bouger également pour sortir, sans quoi, Riok aura vraiment passé un weekend de merde avec des tâches ennuyeuses. La vie de chaebol n’était pas de tout repos, et parfois il se demandait s’il était bien de la même famille que ces gens au train de vie si différent des autres.

La colocation, c’est quitte ou double. Soit tu tombes sur une personne supportable, soit tu tombes sur un qui ne s’occupe ni de tes affaires ni de ta vie, soit, pire, tu tombes sur un chieur. Par un inconnu miracle, Evan avait écopé de Riok comme colocataire. Il s’est avéré qu’en peu de temps, les deux cohabitants ont développé une bonne amitié fondée sur le fait qu’ils se ressemblaient beaucoup de par leur lourd passif. Ce lien venait un peu du fruit du hasard, le destin. Il avait pas croisé de chat noir le matin même peut-être. Enfin quoi qu’il en soit, sa bonne étoile avait encore frappé fort cette fois.
La journée avait été d’une banalité sans nom. D’ailleurs, affalé tranquillement sur son lit, il se demandait encore bien à quoi cette journée avait servi. C’était à peine s’il avait parlé à quelqu’un. Il n’avait donné le plaisir d’entendre sa douce voix qu’à une serveuse d’un café miteux pour commander un cappuccino. C’est dire à quel point c’en était presque désespérant, lui qui a tant besoin d’user de toute son énergie, le voilà en surplus de vitalité. Le seul qui aurait la responsabilité de le supporter était Riok. Et comme si la force de la pensée suffisait à faire exaucer ses vœux, il avait fait réapparaître son meilleur pote qui venait de rentrer dans la chambre. Evan enleva ses écouteurs dès qu’il entendit le cliquetis de la serrure retentir ainsi que la pression exercée sur la poignée de la porte pour saluer le retour du Franco-Coréen par un check de la main. « J’suis sorti pour aller m’acheter un capuccino et courir un peu mais j'ai croisé personne » lâcha-t-il, l’air dépité. Apparemment, Riok avait entendu ses prières puisqu’il lui proposa de sortir s’amuser un peu, à son plus grand bonheur. Mais il réfléchit un instant aux conséquences que cette sortie allait engendrée, c’est-à-dire assister à ses cours du lendemain matin avec une belle gueule de bois et des sacs noirs sous les yeux, alors il hésita. Riok le ramena cependant à la réalité. Evan, hésiter à sortir ? Ca ne lui ressemblait pas du tout. « J’dis jamais non pour sortir. Let’s go! » Aussi avait-il omis d'ajouter qu'il ne dirait jamais non à un petit verre. Sans perdre plus de temps, il se leva et prit sa veste avant de sortir de la chambre. Il huma l’air quelques secondes comme s’il était resté confiner toute la journée.

Une fois arrivé, Evan prit la première place qui lui tombait sous le nez devant le bar et fit signe au barman de prendre sa commande. « Une bière pour moi. Et toi ? » s’adressa-t-il à son ami. Mieux valait commencer par du léger s’il voulait pouvoir rentrer au dortoir sans encombre. « Au fait ton week-end, bien ou chiant ? »

Le dogsuli sourit à son colocataire, une lueur chapardeuse éclairant ses yeux. « Ah, je savais que tu pourrais pas refuser. Avant je vais me changer, j’ai pas envie d’aller boire dans un costume tiré à quatre épingles ». Cependant, il hésita avant de se changer. Il se sentait observé, pour une étrange raison. Mais il se dit qu’il se faisait des idées. Il alla donc se changer, troquant son costume pour un jean, un pull et des putains de baskets qui au moins ne lui serraient pas les pieds. Ceci fait, il regarda leur chambre d’un air suspicieux. Bah, c’était rien. Ils sortirent de la chambre.

Arrivés au bar, Riok demanda un verre de whisky. C’était l’un des alcools forts qu’il arrivait à supporter, et visiblement, il s’en était passé des choses pour qu’il en demande. « Barbant » répondit l’aîné avec un grognement. « J’ai servi à faire le messager pour mon oncle, et répondre à des trucs que je sais même pas pourquoi du comment ». Même si maintenant ça faisait quelques années qu’il était ici, il n’avait aucune base solide sur quoi se fier ni même comprendre le business familial. Enfin, ça tournait principalement autour de la médecine. « J’aurais du voir Su Nah, mais j’ai pas pu » Il décida d’intégrer le sujet ainsi. Il remercia le serveur avant de tourner son verre entre ses doigts. « Tu sais la championne de taekwondo ? On se voit…Enfin, pas dans le sens où on se fréquente sérieusement. Mais je l’aime bien ». Riok avait l’habitude de se confier à Evan en toute confiance, après tout, ils venaient du même chemin, alors il ne pouvait que faire confiance au plus jeune.
Riok guetta néanmoins la réaction du Taïwanais. Le dogsuli ne restait pour ainsi dire jamais longtemps avec une fille, sérieusement. C’était à droite à gauche, mais pas plus, alors le fait que Su Nah fasse partie des membres « VVIPS » à avoir droit à le voir plus fréquemment était un exploit.

Les néons pourris du bar éclairaient à peine leurs visages maussades à peine enjoués à l’idée de boire un coup. Pourtant, rien de tel qu’une dose de bonheur liquide pour rendre ce sourire en voie de disparition. Boire lui faisait se rappeler sa mère aussi, parfois, pendant quelques rares moments privilégiés passés à ses côtés. Mais pas ce soir. Ce soir il préférait attiser son attention au fond de son verre. Observer des glaçons fondre lentement, il n’y avait rien de plus passionnant. Son colocataire était là pour l’accompagner, heureusement sinon cette soirée aurait déjà été classée dans la partie à vite oublier de son cerveau. Evan lui demanda comment s’était passé son week-end. Il fut presque rassuré de savoir que celui de son meilleur pote était au moins aussi pourri que le sien. « Tu m’étonnes que ça a du être barbant ton truc là » retorqua-t-il tout en se resservant lui-même à la bouteille d’un alcool inconnu laissée à l’abandon sur le comptoir. Bien sûr, il vérifia d’abord que le serveur n’était pas dans les parages pour le prendre à frauder ainsi dans ses réserves.

Il en perdit presque le fil de la conversation jusqu’à ce qu’un doux nom le ramène à la réalité, dans ce bar miteux à côté de son pote de toujours. Su Nah. Le dogsuli ignorait jusque là que son ami fréquentait la saja. « Je savais pas que tu la voyais ». Il n’irait pas jusqu’à dire que le peu qu’il avait commencé à construire avec la jeune femme venait de voler en éclat, mais voilà une discussion forte intéressante qui lui fera y réfléchir à deux fois avant de s’approcher aussi galamment d’une femme sans avoir tâté le terrain au préalable. Il tiqua sur le pas dans le sens où on se fréquente sérieusement de son ami. « Donc c’est sérieux… » D’une traite, il avala la dose d’alcool presque aussi vite qu’il n’avait rempli son verre. « ou alors c’est juste pour le sexe ? » Il n’y allait pas de main morte tout simplement parce qu’il voulait éclaircir cette histoire et qu’il ne voulait pas entrer en compétition ou quoi que ce soit avec son ami. Leur amitié valait mieux que ça après tout et ça serait dommage de la gâcher pour une femme.